Soleil ou nuage

La marraine de ma fille lui a offert un soleil et un nuage. Cela a l’air d’un début de conte, mais c’est bien réel : ma fille collectionne, suivant en cela son groupe d’amies de l’école, des espèces de petites figurines molles, qu’elles appellent « squichies » (je n’en connais pas l’orthographe réelle, ni même si c’est le terme exact). Et donc, sa marraine lui a offert un soleil et un nuage. Ce matin, ma fille me demande : « Tu préfères le soleil ou le nuage ? » J’ai immédiatement pensé à une phrase que répétait souvent des personnages dans les livres de Pierre Bottero, qui ont accompagné la fin de mon enfance et mon début d’adolescence (c’est dans le cycle d’Ellana) : « Il y a deux réponses à cette question, celle du savant et celle du poète. La réponse du savant, c’est que je préfère le soleil, parce que sans soleil il n’y aurait pas de nuage. La réponse du poète, c’est que je préfère le nuage, parce qu’il est plus proche, je distingue mieux ses formes, et surtout, il change, est en mouvement visible à l’oeil. » Je pensais alors au fait que les poèmes consacrés au soleil ont souvent été épiques, alors que, quand Baudelaire s’est mis à célébrer les nuages, il a dû le faire dans un poème en prose. En plus de l’opposition entre logique et esthétique, venait celle entre ce qui est lointain et grandiose, et vénéré pour cela, avec ce qui est proche et habituel, donc souvent oublié, moins regardé. En somme, les questions d’enfant me plongent dans des abîmes.

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