Oui, c’est difficile. Difficile de défendre le droit des Juifs à exister au Moyen-Orient sans faire le jeu de l’extrême-droite israélienne. Difficile de défendre les Palestiniens face au massacre qu’ils subissent actuellement sans faire le jeu de l’antisémitisme. Difficile de lutter contre l’islamisme sans faire le jeu de la haine contre les musulmans. Difficile de défendre les musulmans face aux discriminations qu’ils subissent sans faire le jeu de l’islamisme. Difficile de tenir un propos anti-impérialiste quand son pays a été colonisateur récent. Difficile de tenir un discours critique sans faire le jeu de ceux qui récupèrent ce discours pour l’intégrer dans des volontés politiques bien plus dégradantes que le système actuel. Difficile de faire face à tous les problèmes politiques : ils sont si nombreux, si complexes, si tendus. Rien que pour la question écologique, il faudrait y passer cinq heures par jour pour tout réellement comprendre. Difficile de le faire sans oublier ce qui n’est pas au cœur médiatique du moment : Congo, Soudan, Arménie, Ukraine… Le conflit israélo-palestinien : qui parle ici à la fois arabe et hébreu, pour vérifier et analyser clairement toutes les sources et les débats ? On voit la souffrance, les bombes, les gens qui pleurent, et c’est difficile. Difficile de continuer, difficile de comprendre, difficile de savoir quoi dire, difficile de tenir un propos qui ne soit pas lui-même une pierre ajoutée à la violence. Mais c’est ça, la politique. Beaucoup de gens croient que c’est juste une question de partis, alors que c’est une question de rapport au monde. On fait face, on doit trouver des mots pour analyser la complexité du réel, et en plus de cela des idées pour atténuer la violence de ce réel. C’est la discipline la plus difficile qui existe. Mais si on ne s’y met pas, la souffrance demeurera et s’accentuera.