Dans un reportage sur les jeunes gens qui travaillent dans des cabinets financiers à La Défense, au milieu d’une ambiance dégueulasse, toujours sur le fil du burn-out, avec qui plus est la certitude d’être des parasites obstacles à l’économie réelle et à la société, un jeune homme dit : « Je préfère pleurer dans une Mercedes qu’être heureux dans le métro. » C’est l’une des phrases les plus stupides auxquelles il m’ait été donné d’être confronté, pourtant la concurrence est rude. Il faudrait accomplir toute une généalogie de la bêtise qui permet d’arriver à une telle assertion. « L’argent ne fait pas le bonheur, assumez-le et choisissez le malheur. » J’y songeais en passant l’autre jour à Genève, cette ville si riche, si propre, où les gens ont l’air d’aller si bien, ville d’Europe où l’on trouve le plus de résidus de drogue dans les égouts. Les riches sont la plupart du temps tristes, le reste du temps ils sont drogués. Ils finissent par tout plaquer pour aller faire du maraîchage bio dans les Hautes-Alpes, tels les anciens courtisans les plus infects, qui plaquaient soudain tout pour s’enfermer dans des monastères. Ils remplaceront alors le frisson de l’épuisement de bureau par le frisson de l’épuisement du travail de la terre… Alors qu’il est pourtant si simple d’être heureux dans le métro.