On désire malgré tout être compris. Cela est un obstacle. Les événements arrivent les uns sur les autres, en même temps. Ainsi doivent l’être les mots. Sans ordre, pas de pensée, donc pas de compréhension. On écrit véritablement, donc personne ne comprend, soi-même pas plus qu’un autre. Quoique les auteurs réellement illisibles soient très peu nombreux. Cependant si l’on écrit ainsi, on prend le risque du délire pour universitaires. Les expérimentations sont passées de mode, nous en sommes revenus aux romans avec passages obligés ; Aristote, revenu, nous pondrait une Poétique dévoilant la structure des œuvres-phares de la rentrée littéraire. Je m’éloigne de mon sujet. Ou alors je n’ai pas de sujet. Ce que je voulais dire, la pensée qui m’a éveillé, m’a levé et m’a fait prendre des notes sur mon téléphone : il faudrait creuser la prose jusqu’à en faire du vers. Je pense à cette phrase depuis longtemps, mais aujourd’hui (hier) 31 août, je lis coup sur coup une réflexion sur ce phénomène (poème-prose) sur le blog de Mathieu Jung, et dans la troisième partie de L’Éducation géographique de Pierre Vinclair (il parle alors de Claude Simon). Aucun commentaire pertinent ne me vient, je rêvasse seulement entre ces coïncidences. Forcément cette question m’obsède quand je recommence à écrire des vers, et plus précisément à vérifier, à m’imposer des contraintes, bien que sans emphase aucune, disons plutôt sur le mode du « vélo d’appartement » (idée là aussi de Vinclair, « j’utilise le sonnet comme un vélo d’appartement », je cite de mémoire). Pente naturelle : je multiplie les références et ne produis pas grand-chose. Je vais finir comme Bouvard et Pécuchet, à recopier des pages appréciées, puis tout et n’importe quoi. Une part substantielle des comptes sur les réseaux sociaux font d’ailleurs plus ou moins cela. Encore faudrait-il que je le fasse joyeusement. Ayant presque terminé un autre recueil, réunion de poèmes anciens transformée en livres, sur un fil ténu, Anaïs voulut le lire, et le trouva franchement déprimant, y compris les poèmes récents. Peut-être est-ce là une clef de ma séparation avec les modes actuelles : une écriture trop désespérée. Il me semblait pourtant avoir beaucoup de lueurs, d’éclairs de joie, je me demandais même si on ne me considérerait pas comme un peu niais, avec quelques enthousiasmes outrés par moment… On ne sait jamais comment on sera lu. On désire malgré tout être compris. Cela est un obstacle. Depuis le début de ce blog et l’échec de mes « Recherches poétiques » (premiers articles), je papillonne. En amorçant ce texte, je comptais l’intituler « Maigre poésie » et reprendre plus ou moins ce format initial, reprendre la réflexion sur la poésie, en approfondir sa connaissance, non pas pour avoir des lecteurs (au contraire, cette activité auto-centrée en ferait perdre : les statistiques témoignent que les lecteurs viennent bien plus pour les sujets liés à l’actualité), mais pour atteindre un progrès intellectuel. Toujours cette question du progrès de ma pensée m’a obsédé, d’ailleurs mes derniers textes en témoignent indirectement : sortir du prêt-à-penser, puis peu à peu de tous les clichés, sociaux aussi mais bien sûr esthétiques, aller plus haut, quelque part, mais cela aussi est peut-être un cliché, et en prendre conscience mènerait plus haut, mais non, cela ne marche pas ainsi. Je n’aurais réussi qu’à produire une nouvelle rêverie. C’est déjà quelque chose.
Bonjour,
< Cependant si l’on écrit ainsi, on prend le risque du délire pour universitaires.
Ce risque vaut bien sa chandelle, là où certains des chemins parent à l’aile !!
Et < C’est déjà quelque chose ¡ !
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