Résolutions. Continuer sur le rythme de croisière précédent. Tenir ce journal d’écriture, terminer une chronique de poésie contemporaine par semaine, faire quelques travaux à côté, tout en restant un enseignant digne de ce nom et un père et un mari de même, le tout sans m’épuiser. Cela fait une légère baisse d’ambition par rapport aux résolutions de début d’année, mais c’est tout de même quelque chose.
Situation. Un « bilan de janvier », si telle chose devait exister, serait nécessairement mitigé. J’ai eu des phases de fatigue profonde. Elles sont liées, en premier lieu, au travail d’enseignant. Ce n’est pas le lieu de revenir sur des éléments qu’on trouve ici et là sur les réseaux sociaux, beaucoup de collègues en ont déjà parlé : dans ce travail comme ailleurs, en cette ère anciennement dite « néolibérale » et que je préfère qualifier de « capitaliste autoritaire », les enseignants comme les autres sont soumis à des demandes intenables et à des pressions multiples et désagréables. J’en avais fait un article en fin d’année scolaire dernière, je n’y reviens pas.
J’ai tenu le minimum que je cherchais à tenir. Les projets poétiques personnels ont peu avancé, mais ce n’est pas grave. J’ai terminé La Mort immortelle de Liu Cixin, c’était tout de même 940 pages. Il me semble le premier exemple d’œuvre dont je n’ai aimé ni le début ni la fin, mais que je conseille néanmoins à tout le monde ; le deuxième tome (de la trilogie Le Problème à trois corps, donc) me paraît toujours un chef-d’œuvre, et la quasi-totalité du troisième également, à partir les cent dernières pages. Il a sans doute construit son travail autour des idées géniales qui vont de la fin du tome 1 aux deux tiers du tome 3. Cela vaut quand même la peine. -Navré de poser ces remarques ici, mais cela je n’aurais pas le courage d’écrire un article entier sur cette œuvre, et j’écris déjà assez de fragments comme cela. Fin de la parenthèse.
Le nombre de lecteurs sur le blog a été bien plus mince que d’habitude la semaine dernière. Cette donnée est certes de peu d’importance, mais on se pose toujours la question : pourquoi ? (On se pose la même quand « ça marche ».) Généralement, il n’y a pas de véritable réponse. C’est une somme de hasard. Peut-être devrais-je faire comme beaucoup : choisir l’heure de publication en fonction des pics de présence, faire telle ou telle action de mise en valeur, mais cela m’ennuie. De toute manière, je suis assez mauvais vendeur : j’écris essentiellement avec mes doutes. Même problème en politique : quand on me demande mon avis, je commence souvent par expliquer pourquoi les gens de mon bord politique sont loin d’être exemplaires, puis pour quelles raisons mes idées pourraient être remises en question. Quand je me relis, je ne vois que les fautes de goût, quand ce n’est pas les fautes d’orthographes liées au fait que j’écris trop rapidement et hais profondément me relire (je me relis tout de même, par conscience professionnelle, mais mal, ce qui me met en état de mauvaise conscience professionnelle).
Avancées. J’ai mis au clair quelques éléments sur l’intelligence artificielle dans un article de la semaine dernière. Cela fait suite à quelques échanges et de nouveaux articles lus. On a heureusement dépassé le stade techno-béat du « c’est du révolution » pour voir que c’est une étape dans des processus, dont beaucoup sont déplaisants (triche généralisée, aspiration de données privées à fins financières, hausse terrifiante de consommation d’énergie, entre autres). J’ai fait ma chronique sur le livre d’Esther Tellermann, Selon les sources. Je me suis aperçu, du fait du relatif silence qui l’a suivi et de quelques remarques de lecteurs, que je n’étais pas parvenu à communiquer un enthousiasme, contrairement semble-t-il aux chroniques précédentes. Cela arrive. Ce n’est pas grave. -Quelques poèmes épars. Revenant sur l’injonction d’Emmanuel Hocquard, « faire livre plutôt que recueil », ce qu’ont bien suivi les quatre auteurs chroniqués ce mois-ci, je me rends compte que c’est bel et bien ce que je n’arrive pas à faire, et qui me mets en marge de la poésie contemporaine. La quasi totalité de mes poèmes valent seuls. Les édifices que je tente de reconstruire pour « faire livre » sont toujours superficiels. Il n’y a pas de nécessité à l’échelle de l’objet. Surmonterai-je, ou pas ? L’avenir dira. C’était le projet de 2025, mais c’est justement celui qui est passé le premier à la trappe, -peut-être pour revenir par la fenêtre.
Perspectives. Je comptais acheter Le Rêve d’un langage commun d’Adrienne Rich et un Aurélie Foglia pour mes chroniques de poésie, mais j’ai attendu la paie de janvier pour cela. Sinon, j’avais Sens inverse de Valérie Rouzeau, que je pouvais reprendre. Chez ma mère, où j’étais pour deux anniversaires le weekend dernier, je tombe sur Un Peuple de Stéphane Bouquet, publié chez Champ Vallon, non loin de chez moi. Ma mère me dit : « Tu ne vas pas aimer. » Cela me donne encore plus envie de le lire. En vérité, j’aime plutôt bien.