Avancées (34) : 20 août 2025

De la Suisse, quelques éclats. Lucerne certes magnifique. Les nageurs dans l’Aar et dans le Rhin, avec leurs sacs colorés. Vija Celmins à la Fondation Beyeler, sur laquelle j’ai écrit un article issu des notes prises in situ. Le deuxième étage du musées des Beaux-Arts de Bâle : pourquoi une si belle collection d’œuvres du XXe siècle ? Quand les nazis ont voulu se débarrasser de « l’art dégénéré », le musée en a acheté à la pelle. Malins, les Suisses. Calvinisme et secret bancaire, c’est la clef du succès. Spiez donne l’impression d’une utopie réalisée. Impression de touriste, probablement. Tout est plus vert ailleurs. Jean Calvin aurait sans doute des suées en voyant les grandes villas, les terrains de sport et les baigneurs, mais tant pis pour Jean Calvin et son horreur du monde. Il y avait une sorte de fête à Neuchâtel : 22 h a sonné, une part notable de la foule est rentrée en bon ordre chez elle. Avec Anaïs, nous étions morts de rire. Ils sont fous, ces Helvètes. On se dit cela pour paraître léger, mais la vérité est simple : la Suisse, c’est la France avec un degré de civilisation en plus.

Durant une semaine, à part le texte sur Vija Celmins, j’ai terminé le petit texte que m’a demandé Raoul Harivoie. Cela m’a fait plaisir de lire et relire ses sonnets, qu’il publie préalablement sur Instagram. (Je les ai déjà évoqués ici.) N’ai produit ni l’article sur Ian Curtis, ni celui sur Charles Reznikoff, ni celui que j’envisage sur Grand Poisson de Fabrice Sanchez, qui sort demain. Les « tops 100 des années 2020 » étant apparus sur SensCritique, j’ai commencé à enchaîné les albums qui se trouvent sur le top idoine. J’en avais déjà écouté un certain nombre ; ceux que j’écoute en ce début de semaine, pour la plupart, me plaisent beaucoup. Cette décennie est musicalement bien plus faste que la précédente. Je suis toujours étonné quand j’en parle à l’extérieur, et que la plupart des gens ne savent pas que se développe actuellement une vague tout à fait profonde et rafraîchissante. Les radios continuent certes de nous verser la soupe électro-pop agrémentée de hip hop mou, c’est d’ailleurs ce qui est le plus streamé en France. Un biais probable : les gens disent aimer des albums très recherchés, mais les écoutent sans doute moins que ce qui les détend, leur permet de ne penser à rien. Biais que j’appelle « le biais Arte » : les sondages sur la télévision montrent toujours que les Français affirment que leur chaîne préférée est Arte ; pourtant, ce n’est pas la plus regardée.

Nous regardons d’une traite les quatre heures de la série Adolescence. Le battage médiatique et politique à son sujet donne des a priori négatifs ; c’est cependant une œuvre de qualité. La narration est intéressante. Le dernier épisode produit un décalage par rapport aux attendus, et cela m’a plu. Je ne suis pas certain que le discours sur l’école, et plus particulièrement sur la violence du collège, soit très profond ; c’est le thème central, mais la narration tourne autour, ne cherche pas à plaquer des discours, pose des éléments sans nécessairement les développer. L’œuvre fait appel à l’intelligence du spectateur, ce qui est loin d’être la norme sur Netflix. Évidemment, on pourrait trouver à redire sur tel ou tel passage ; ce n’est pas un chef-d’œuvre, mais une œuvre digne d’intérêt. Quant à la proposition de notre ministre de montrer cette série dans les collèges, elle me paraît assez absurde. Il faudrait tout un article pour développer cette opinion, mais j’ai déjà trop de textes en retard. La complexité du discours en fait une œuvre pédagogiquement pertinente pour des secondes, mais à mon avis pas pour des collégiens : ce qu’on aura, en cas de débats dans beaucoup de classes, c’est le développement des arguments incels et du « Katia était une harceleuse, elle l’a donc un peu cherché ». Ce pourquoi, d’ailleurs, la série fait le choix de ne pas montrer le procès : les propos de l’avocat de Jamie risqueraient fort de convaincre des spectateurs.

Je relis La Prisonnière de Marcel Proust. Je fais du sport. J’apprends le portugais. Un de ces jours, il faudra que je reprenne mes cours pour la période à venir. Mais pas aujourd’hui car, aujourd’hui, c’est mon anniversaire. Nous avons regardé Only Lovers Left Alive de Jim Jarmush, puis écouté la bande originale en boucle. Douze ans que je devais voir ce film ; il était aussi bon qu’attendu. Beaucoup de textes à écrire, donc, et un mariage d’amis à l’autre bout de la France ce weekend. Tout continue.

6 réflexions sur “Avancées (34) : 20 août 2025

  1. Mêmes impressions sur la Suisse ( en trois / quatre jours de découverte itinérante, donc survol assumé). Riche, cultivée, polie, policée. Et un brin roublarde pour si bien mettre tout le monde dans sa poche… Musée de Bâle fermé quand on y est passé lundi, du coup on reviendra.
    Peu lu, rien écrit. Et tout continue.

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